Le lavage du linge jusqu’au début du 20° siècle :

Le linge est d’abord trié, petit linge délicat et gros linge. Ce dernier est trempé dans de l’eau avec du carbonate de soude, ce qui a pour but de dilater les fibres et d’éliminer les taches les plus solubles. Dans un cuvier, on place au fond des sarments de vigne puis un cendrier en étoffe contenant des cendres; par dessus, on dispose le linge blanc et celui de couleur. On arrose le cuvier plusieurs fois d’eau chaude qui s’évacue par un orifice au fond; cette opération, appelée le coulage, dure une demi journée.
Après la grande guerre, la lessiveuse en zinc apparaît, mais le principe reste le même. Une fois lavé, le linge est emmené dans des paniers, les mannes, au lavoir. Là, il est savonné pour éliminer les taches les plus rebelles; il est ensuite rincé et essoré.

Au village, on lave le linge une à deux fois par mois. Le petit linge est lavé à la maison, le gros linge au lavoir. On lave le linge pour son compte ou pour autrui; La laveuse, appellation de la lavandière en Brie, est payée à la journée. Quelques maisons possèdent leur propre lavoir.

En mémoire …du lavoir.

Ah ! Qu’il était charmant, notre petit lavoir du Boutoy, niché dans son écrin de verdure, au milieu des champs ; qu’il était charmant avec l’arche de son pont sous laquelle coulait une eau de source claire et fraîche. Pendant de longues années, il a connu des heures de gloire et tout le monde le respectait. Les jours de grande lessive, les laveuses du Plessier et des Chaises allaient lui rendre visite en poussant des brouettes chargées de lessiveuses fumantes, remplies du linge de toute une famille. Ses voûtes résonnaient alors, des coups de battoir, du bruit des brosses en chiendent sur les draps et les bleus de travail des hommes et aussi…des dernières nouvelles du coin. Les enfants frottaient des chaussettes et des mouchoirs, jouaient avec la mousse et parfois, s’attiraient la colère de leurs mères quand ils échappaient le savon qu’elles devaient récupérer au fond de l’eau. L’été, la lessive n’était pas une corvée mais l’hiver, le froid engourdissait les mains qu’il fallait secouer pour faire circuler le sang. Et voilà qu’un jour, une ère nouvelle a commencé ; le règne de la machine à laver s’est installé pour faciliter la tâche des ménagères : c’était merveilleux ! Alors, peu à peu, le lavoir a perdu de son prestige. Tout seul, abandonné loin des regards, il s’est dégradé …on l’a dégradé. Ses planches ont servi à activer les feux de camps, les barbecues. Ses tuiles sont parties vers une autre destination. Envahi par les ronces, les orties, après avoir longtemps résisté, il a rendu les armes : cette année, ses murs se sont effondrés sous je ne sais quelle pression. Il ne reste plus qu’un lamentable
tas de pierres, signe de la mort du charmant lavoir et dans quelques années, toute trace de son existence aura été effacée à moins qu’un projet collectif ne permette d’en garder la mémoire.